Le règlement collectif de dettes et la faillite : même protection ?

L’on dit souvent que la procédure en règlement collectif de dettes est la version « civile » de la faillite.

Il est vrai que ces deux procédures visent à offrit au débiteur « en bout de course » un « fresh start ».   Cela étant, les deux régimes ne sont pas sur le même pied d’égalité.  Loin de là.   C’est d’ailleurs sur ce point qu’un arrêt très intéressant a été rendu par la Cour Constitutionnelle en date du 2 octobre 2008.

L’affaire concerne la différence de traitement d’une personne qui bénéficie d’une indemnité pour la réparation d’un préjudice extra-patrimonial selon que cette personne ait été déclarée en faillite ou admissible dans le cadre d’une procédure en règlement collectif de dette.

Ce cas d’espèce, un médiateur de dettes, qui avait été désigné dans le cadre du règlement collectif de dettes auquel un couple a été admis, s’adresse au juge des saisies afin de trancher le litige l’opposant à ce couple en ce qui concerne les revenus qui reviennent à la médiation de dettes.   Les époux sont en effet parties à une procédure judiciaire en réparation du dommage qu’ils sont subi du fait du décès de leur enfant et de la mère de l’épouse, à la suite d’un accident de roulage.

En effet, et l’on comprend aisément le malaise du médiateur de dettes et du juge des saisies, la personne qui bénéficie d’une procédure en règlement collectif de dettes ne bénéficie pas de la protection instaurée par l’article 16 alinéa 4 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites (« sont également exclues de la faillite, les indemnités accordées au failli pour la réparation du préjudice lié à la personne et causé par un acte illicite »), alors que, dans les deux cas, il s’agit de respecter l’article 1166 du Code Civil qui précise que les créanciers peuvent exercer « tous les droits et actions de leur débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne. » ( Cette disposition consacre le principe général selon lequel les droits extrapatrimoniaux sont hors commerce et ne sont pas susceptibles de saisie – Doc.Parl.Sénat, 1963-1964, n°60, p.308).

Par conséquent, cette indemnité devait revenir à la médiation de dettes, en vertu de l’article 7 de la loi hypothécaire et du principe selon lequel le patrimoine du débiteur constitue le gage de ses créanciers.

La Cour Constitutionnelle, après avoir examiné les deux régimes applicables, soit l’article 16 alinéa 4 de la loi du 08 août 1997 sur les faillites et l’article 1675/7 §1er alinéa 2 du Code Judiciaire, conclut qu’au contraire, la différence de traitement entre ces catégories de débiteurs n’est pas justifiée de manière objective.

La seule qualité de commerçant ou de non commerçant, qui constitue le critère objectif pris en compte est insuffisant pour aboutir à des solutions à ce point différentes dans la mesure où les régimes comparés, s’ils ne sont pas identiques, aboutissent néanmoins au même résultat, celui d’offrir une nouvelle chance au failli ou à la personne endettée.  

La Cour relève d’ailleurs que la situation des cautions est traitée, de manière comparable, dans la procédure de faillite et dans la procédure en règlement collectif de dettes.

Par conséquent, la qualité de commerçant ou non est relativement indifférente dans ces situations.

Par conséquent, la Cour Constitutionnelle estime que l’article 1675/7 §1er alinéa 2 du Code Judiciaire est contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.

A bon entendeur….

Geoffroy LEMAIRE

glemaire@avocats-ldl.be